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Photo du rédacteurFrédéric Thiriez

La chronique littéraire de Frédéric Thiriez : "Son odeur après la pluie" de Cedric Sapin-Defour

Dernière mise à jour : 22 déc. 2023


Parue dans Le Nouvel Économiste


Quand un bouvier bernois bouleverse la vie d’un homme





En toute subjectivité, par Frédéric Thiriez


Son odeur après la pluie, de Cedric Sapin-Dufour,

Stock 2023










Je connaissais le Sapin-Defour alpiniste, partageant moi-même cette passion. J’appréciais le Sapin-Defour écrivain de montagne, notamment son délicieux Dico impertinent de la montagne, JM Editions, 2014) où il se moque gentiment des manies et du jargon des grimpeurs (1). J’ai découvert avec un étonnement ravi le Sapin-Defour romancier. Mais est-ce un roman, cet objet littéraire non identifié que Son odeur après la pluie ? Un récit ? Une leçon de vie ? Un essai philosophique ? Une très belle histoire d’amour en tous cas entre l’homme et son chien.


“Les rencontres décidées à embellir notre vie surgissent aux mornes journées, c’est ainsi, rien ne les annonce”entame le narrateur, qui raconte son premier contact avec le petit bouvier bernois dont il allait être, non pas le maître, avertit-il, mais le compagnon : “C’est ainsi, il m’a regardé, je l’ai regardé, nous nous sommes dit c’est toi et la terre a changé d’axe”. Plus rien n’est comme avant pour cet homme confronté à une autre vie que la sienne. Le chien, dénommé Ubac (l’auteur n’est pas montagnard pour rien), est toujours collé à lui (les bouviers bernois sont ainsi !), toujours de bonne humeur, dès le matin: “Le cœur d’un chienne monte pas en puissance, il est en haut, gonflé,tout de suite et toujours, il y a amour dès le réveil”. L’homme parle sans cesse à Ubac, comme s’il allait lui répondre.


Ils font à deux d’interminables promenades : “Ubac s’émerveille de tout, d’une chenille, du vent dans les arbres, de ce qu’on ne voit plus... Sa faculté à s’émerveiller est un antidote au désenchantement…”. Bien vite, l’homme et son chien ne font plus qu’un : “nous formons une dyade, un organisme vivant,ni lui ni moi mais fait des deux… Lorsque je marche, nous marchons. Lorsqu’il s’arrête, je m’arrête. On se demande qui tient l’autre !”. L’influence du chien se fait même sentir sur la philosophie de vie du narrateur : “Ubac ne dévoue aucune seconde de sa vie à tenter de réduire l’incertitude. Il n’attend rien et cela semble bigrement efficace pour qu’il advienne beaucoup (…) Il me plaît d’adhérer à la définition de l’aventure que m’offre sans le savoir Ubac, celle de consentir aux richesses de l’imprévu”.


“Le cœur d’un chien ne monte pas en puissance, il est en haut, gonflé,tout de suite et toujours,il y a amour dès le réveil ”


Cet amour inconditionnel n’a rien d’exclusif. Lorsque Mathilde, l’amoureuse du narrateur, s’installe dans sa vie, le duo devient trio : “Aucun amour n’en annule un autre, c’est tout bonnement l’inverse”. Cette vie à trois (Ubac, Mathilde et moi) deviendra une vie à cinq… dans des conditions que je vous laisse découvrir en lisant ce livre qui mérite largement le succès qu’il rencontre.


(1) Voir mon Dictionnaire amoureux de la montagne, Plon, 2016, p. 468.




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