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Photo du rédacteurFrédéric Thiriez

La chronique littéraire de Frédéric Thiriez : "La colère et l'envie", d'Alice Renard

Dernière mise à jour : 17 nov. 2023

Parue dans Le Nouvel Économiste


Premier roman ‘La colère et l’envie’, d’Alice Renard


Une surdouée raconte la souffrance et la guérison par l’amour d’une jeune fille pas comme les autres

En toute subjectivité, par Frédéric Thiriez

La colère et l’envie, Alice Renard, Editions Héloïse d’Ormesson, 2023






"Tu es le seul qui m’ait crue capable de vivre. Tu as vu que ce qu’il y avait en moi, ce n’était pas une malédiction mais une promesse. Tu m’as révélé cette promesse".

Ainsi se termine le très beau premier roman d’Alice Renard, une jeune étudiante en lettres, qui nous conte l’histoire d’Isor, une petite fille pas comme les autres, que nous suivrons jusqu’à ses 17 ans. Elle ne parle pas, elle ne communique pas avec ses parents, sauf par des crises de larmes incontrôlables, par des colères noires comme l’orage ou par de brefs câlins, elle refuse d’apprendre, n’est pas scolarisée. Parfois elle danse toute seule, puis s’arrête et s’allonge sur le tapis du salon, le sourire aux lèvres. A 10 ans, elle est capable d’imiter parfaitement le cantonais ou l’arabe après l’avoir écouté à la télévision. Puis, elle se met à fuguer, le jour d’abord, la nuit ensuite. Son père, cordiste, et sa mère, pompier, en font des cauchemars. Ils ont fait examiner Isor par tous les spécialistes, en vain. Pour lui, “elle a toujours été frappée par une sorte de débilité”, alors qu’elle dit : “quand tes yeux transpercent, quand ton regard nous file entre les doigts, c’est que tu comprends des choses que nous ne comprendrons jamais”.

Tout change le jour où les parents,accaparés par un dégât des eaux, demandent au voisin, Lucien, un vieil homme solitaire de 76 ans, de garder Isor pendant une heure. C’est une sorte de coup de foudre : ces deux-là s’aiment d’un amour aussi pur qu’absolu. Lucien : “Un homme de mon âge, rien ne peut plus lui arriver. Je n’ai plus la force ! Mais, vois-tu, je me trompais. A 76 ans, j’avais encore Isor à rencontrer”. Isor est si conquise qu’elle passera presque toutes ses après-midi chez Lucien, à l’écouter parler de sa vie et du malheur qui l’a terrassé, à lui montrer les trouvailles ramenées de ses fugues, à découvrir la musique classique.

“Quand tes yeux transpercent, quand ton regard nous file entre les doigts, c’est que tu comprends des choses que nous ne comprendrons jamais ”

Trois ans plus tard, survient l’accident : Lucien est victime d’un AVC, en présence d’Isor. Celle- ci appelle les pompiers : elle sait donc parler. Lorsque son père revient à la maison, il découvre une lettre d’Isor : elle sait donc écrire. Dans ce petit mot, au français approximatif, la jeune fille de 16 ans annonce à ses parents, avec beaucoup de tendresse, qu’elle part pour quelque temps : “Je vais pour Lucien. Faut pas le disputer : il sait même pas -c’est moi qui décide seule. Quelque chose devait être fait par moi pour lui”.

J’en ai assez dit ! Le lecteur découvrira au fil de la troisième partie du livre quelle était cette mission et où elle mènera la jeune fille, devenue elle-même. Un beau roman sur l’amour salvateur.




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